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Danny Forster, d’aide-soignant à directeur d’établissement


Publié le Mercredi 4 Septembre 2024 à 10:25

C’est un parcours pour le moins atypique. Constatant les nombreuses difficultés du secteur du grand âge, Danny Forster, 29 ans et ancien aide-soignant, est devenu directeur d’EHPAD. Aujourd’hui à la tête d’un établissement parisien, il se mobilise avec assiduité pour faire connaître le secteur de l’autonomie et ses problématiques. Portrait.


« À 17 ans, bénévole et secou- riste à la Croix Rouge, j’avais envie d’aider les autres », se souvient Danny Forster. Aujourd’hui âgé de 29 ans, il est encore très marqué par cette période : quittant le lycée en classe de Première, il passe à 17 ans le concours d’aide-soignant, par vocation mais aussi pour « ne pas se retrouver sans revenu ». Trois années durant, il exerce dans des EHPAD et des établissements de soins à domicile. « Aide-soignant est un beau métier, proche des résidents, mais c’est aussi un métier physique, qui comporte des facettes plus sombres et notamment le manque de considération de la part de certaines familles ou de certaines directions », raconte-t-il. À 20 ans, il reprend donc ses études avec un objectif en tête : devenir directeur d’EHPAD pour changer les choses de l’intérieur.
 
N’ayant pas le baccalauréat, Danny Forster passe un Diplôme d'accès aux études universitaires (DEAU) qui lui permet alors de s’inscrire à l’université, en licence de droit puis en master. En 2020, il en ressort avec non pas un, mais deux masters en Droit social, l’un concernant la Gestion du secteur sanitaire et social, et l’autre spécialisé dans celle des Ressources humaines. « Ce dernier point était vraiment important pour moi. Je voulais m’y perfectionner pour pouvoir vraiment apporter quelque chose de nouveau et de construit », poursuit-il. Après une dernière année d’études, cette fois- ci en master 2 Carrières publiques à Sciences Po Aix, l’ancien aide-soignant atteint alors son objectif et prend la direction d’un premier EHPAD.

Un directeur médiatisé...

Situé en Eure-et-Loir, cet établissement privé de 60 lits lui « fait confiance ». « J’ai pu gérer l’établissement en toute autonomie et mettre en place des animations et des formations pour le personnel soignant, notamment sur la n de vie », complète le directeur, qui n’hésite d’ailleurs pas à prendre part aux activités, réalisant même des toilettes. « Si cette tâche n’est pas, habituellement, dévolue au directeur, le fait que je fasse les toilettes a été, je pense, bien vu de la part des équipes, qui ont pu ainsi être déchargées d’un peu de travail », poursuit l’intéressé pour qui ces moments lui « rappelaient le métier d’aide-soignant ».
 
Soucieux de faire connaître les différents métiers de l’Autonomie ainsi que le quotidien des EHPAD, le jeune directeur opte également pour une communication plus large, laissant par exemple librement entrer la presse dans l’établissement. « Même si la situation tend à s’améliorer, la culture des EHPAD ne valorise pas la communication, auprès des familles comme du grand public. Il est pourtant normal que les proches soient tenus au courant », ajoute Danny Forster, insistant aussi sur la nécessité « de reconnaître la part d’ombre du secteur pour l’améliorer, en changer l’image et retrouver la confiance de tous ».
 
Télévision, radio, internet, magazines... Danny Forster intervient régulièrement dans les médias sur des thématiques d’actualité, telles que la canicule ou la présence d’animaux domestiques en EHPAD. Cette médiatisation, le directeur d’établissement l’explique « un peu par hasard : j’ai été contacté par un premier média, et comme cela s’est bien passé, ils m’ont rappelé et d’autres ont suivi », raconte-t-il en insistant toutefois sur le fait qu’il n’est affilié à aucun syndicat. Ses interventions se font toujours à titre personnel, « comme un acteur de terrain ».

... qui exerce aujourd’hui dans un EHPAD public

Cette vision « terrain », il la doit à son passage par plusieurs types d’établissements. En effet, s’il a débuté sa carrière de directeur dans le secteur privé, Danny Forster est aujourd’hui à la tête d’un EHPAD pari- sien géré par l’un des Centres communaux d'action sociale (CCAS) de la capitale.
 
« Je voulais rejoindre le service public pour notamment prouver que l’on pouvait y avoir un standing similaire à celui du privé », con e-t-il, citant ici l’exemple des retours aux familles : « En cas d’interrogation, il est tout à fait possible de répondre aux familles dans la journée, voire le lendemain ».
 
« Grâce notamment aux élus et représentants actifs sur le terrain, les attentes des familles et des résidents sont prises en compte » tient à souligner le responsable, qui reconnaît aussi que « les EHPAD publics sont souvent considérés comme moyens ». Mais ils sont nombreux à ne pas se satisfaire de cet état de fait. « Beaucoup se démarquent par la volonté de réaménager les entrées, revoir le service en salle et renforcer des animations, afin d'offrir des prestations équivalentes à celles du privé. La seule différence notable pourrait résider dans le mobilier ou l’architecture », souligne, optimiste, Danny Forster.

Plusieurs messages à faire passer

Et optimiste, ce directeur au parcours atypique l’est résolument. Interpellant régulièrement les pouvoirs publics, il est parfois reçu par les responsables politiques, échangeant par exemple, en mars dernier, avec le Premier ministre Gabriel Attal. « Là encore, je pense que cette écoute vient du fait que je ne sois pas affilié à un syndicat, que ma volonté est avant tout d’apporter un éclairage sur le quotidien du terrain », précise Danny Forster, appelant, par exemple, à une augmentation des effectifs en EHPAD : « Deux équivalents temps plein supplémentaires par établissement permet- traient déjà d’améliorer la situation, d’offrir aux équipes le temps de réaliser les soins, mais aussi de réaliser des animations, de rassurer les familles, de discuter avec les résidents... Toutes ces tâches qui sont certes chronophages, mais qui augmentent aussi le bien-être collectif, pour les résidents, les professionnels et les familles ».
 
En matière de bien-être, le jeune directeur s’engage également pour un maintien et un renforcement des contrôles, « quel que soit le statut de l’établissement, car des problèmes peuvent subvenir partout ». « Néanmoins, les pouvoirs publics doivent comprendre que si rien n’est fait pour réguler le secteur privé, d’autres scandales verront le jour. La qualité doit être respectée dans tous les établissements. Et il ne s’agit pas, ici, de jeter le discrédit sur un secteur en particulier, ni sur le monde de l’Autonomie au sens large. Bien au contraire ! », détaille le responsable en appelant à une « réflexion de tous » pour engager « des actes d’amélioration » à grande échelle.

> Article paru dans Ehpadia #36, édition de juin 2024, à lire ici 


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